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Les classes à multi-niveau: une organisation de classe qui favorise l’autonomie, l’entraide, et l’apprentissage

by | Jun 16, 2021 | école élémentaire, école maternelle

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Les classes à double ou à multi-niveau sont de plus en plus fréquentes dans les écoles françaises, surtout en école primaire. A l’EFGB, c’est une approche de l’enseignement à laquelle nous croyons beaucoup et que nous mettons en place chaque année. Mais pour certaines familles, cette nouvelle suscite parfois des interrogations, voire de l’appréhension. Mon enfant ne risque-t-il pas de moins bien réussir que ceux inscrits dans une classe à un seul niveau? Sera-t-il freiné par ceux du niveau en dessous? L’enseignant aura-t-il moins de temps pour lui ? Auront-ils le temps de réaliser tout le programme ? Des questions légitimes mais souvent fondées sur de fausses représentations de l’école. Explications.

 

Projet

Projet Whos Who – Camille Charpentier.

Selon une enquête Decibel réalisée en 2012 par le Ministère de l’Education National, et de nombreuses autres études sur le sujet, les progrès scolaires des élèves étant dans des classes à multi-niveau sont au moins équivalents, voire supérieurs à ceux d’élèves fréquentant un cours simple. En effet, la structure de ces classes pousse les enfants à s’entraider, à être plus autonome, à se prendre en charge, ce qui favorise l’apprentissage et une meilleure gestion du temps de travail.

Camille Charpentier, enseignante d’une classe à 4 niveaux (de CE1 à CM2) à l’EFGB comprend tout à fait l’appréhension des parents, « mais avec un retour de plusieurs mois, je vois la différence avec des classes à simple niveau, voire à double niveaux. Les élèves sont extrêmement autonomes, mais ils savent aussi que je suis toujours là pour les orienter. Les élèves ont appris beaucoup plus rapidement à réfléchir, à se questionner avant de venir me voir. Ils connaissent les règles de la classe – ne pas déranger les camarades dans leur activité – et ils s’organisent dans leur travail.»

Une classe à multiniveau est comme une “mini société,” Camille poursuit. “Il faut comprendre que les camarades n’ont pas le même rythme à cause des différences d’âges. Je n’ai jamais eu d’élèves qui s’entraident autant. En début d’année, quelques CE1 n’avaient pas encore acquis la lecture en français, ainsi je demandais parfois aux CM de travailler avec eux pendant que je travaillais avec un autre groupe. Maintenant je vois des CM lirent de façon spontanée, des livres aux CE. Voir les CM lire dès qu’il était possible de le faire a aussi motivé les CE à apprendre à lire plus rapidement. Maintenant, toute la classe est lectrice et nous pourrions passer nos journées à lire! Et lire c’est devenir autonome.”                                                                                                                   

Ainsi, les plus jeunes sont tirés vers le haut par les grands, tandis que les “grands” sont valorisés. “Lors de travail en groupes, raconte Camille, – je fonctionne souvent ainsi par niveaux de classe ou en mélangeant les niveaux: CE/CM – les élèves s’entraident énormément. Cela peut être simplement la lecture de la consigne car un mot dérange ou l’explication d’une phrase ou d’une procédure en calcul mental,” raconte Camille. “Mais ce n’est pas toujours les plus âgés qui aident les plus jeunes. Par exemple, en début d’année une des CE1 avait une plus grande rigueur en géométrie que les CM, ils ont donc pris exemple sur elle”, ajoute-t-elle.

Du point de vue des compétences sociales, les élèves sont mieux préparés, ce qui est déterminant pour le collège, car ils y sont moins encadrés. Enfin, il est important de comprendre qu’en réalité, la classe simple niveau n’existe pas. Il y a toujours des “retardataires”, ou au contraire des enfants qui vont plus vite que les autres pour assimiler les notions, ce qui oblige l’enseignant à s’adapter en permanence. “L’hétérogénéité est là quoi qu’il arrive, explique Pierre Cieutat, professeur des écoles et formateur à Montpellier, “penser que des enfants, parce qu’ils sont nés entre le 1er janvier et le 31 décembre d’une année, apprennent tous la même chose, de la même manière est infirmé par la recherche en sciences humaines depuis une quarantaine d’années.” 

Les limites d’un enseignement à multi-niveau:

Cependant comme pour toute classe, il y a forcément des limites. Pour Camille, le fait d’avoir des élèves ayant jusqu’à 3 ans et demi d’écart est parfois compliqué. “La maturité est parfois complètement différente, ainsi que la mise au travail ou l’adaptation de nouvelles consignes. Nous avons un conseil de classe chaque mardi où nous prenons la parole sur tout ce qui concerne l’école. Nous pouvons parler du comportement des élèves, des règles à respecter, du travail donné, des choses qui fonctionnent et de celles que nous pouvons modifier. Chaque élève a la parole afin d’exprimer ce qu’il ressent. Nous avons parfois des disputes à régler après une récréation. La première règle de la classe est le Respect; il est obligatoire que tous les membres de la classe se respectent; il est possible d’être en désaccord avec quelqu’un mais l’Irrespect n’est pas accepté. Ainsi, nous parlons souvent afin de clarifier les situations. Je sais qu’il peut être difficile pour les CM d’être toute la journée avec des élèves plus jeunes, donc je leur demande souvent de travailler de façon autonome. Par exemple, depuis deux semaines ils préparent des exposés sur des sujets imposés ou non et nous les présentent. Je demande souvent aux CM d’être les premiers à initier certains projets, ils montrent ainsi l’exemple aux CE et ont une plus grande liberté de travail.” 

Certains enfants peu autonomes peuvent aussi avoir du mal à s’adapter à cette organisation, du moins au début. Les enfants ayant des difficultés scolaires, qui auraient besoin de plus de temps pour assimiler certaines notions, peuvent parfois avoir du mal à suivre. Mais le fait de proposer de toutes petites classes (de 16 à 20 enfants et un ratio professeur/enfants de 1/8 à 1/10 en temps pre-Covid) permet de favoriser une approche personnalisée, dans laquelle nous pouvons nous adapter aux besoins, aux capacités et aux styles d’apprentissage de chaque enfant.

Quant à Camille, elle est très claire sur ce point: “Je ne veux que plus que des classes à multi-niveau. J’adore!”

Propos recueillis par Aurore Joshi